Beudi derroristeu !

« Beudi derroristeu ! », s’exclame le lieutenant Heinrich alias Totor, après son troisième digestif chez Armand, notable du village français occupé par les troupes allemandes ; notable, collaborateur en apparence, mais secrètement chef de la Résistance locale. « Allez Totor, encore un petit verre avant d’aller se coucher » s’amuse Armand interprété par Jean Poiret dans le film « Le Mur de l’Atlantique ».

Voilà ce que m’évoque aussitôt le mot « terroriste » quand je l’entends à tire-larigot. Je pense aux Résistants français de la Seconde guerre mondiale que les nazis appelaient « terroristes » même si je sais qu’il désigne, maintenant, un assassin plus ou moins déséquilibré censé avoir tué au nom d’une religion.

Si ce mot m’évoque aussi cette comédie des années 1970 avec Poiret et Bourvil sans oublier l’inimitable acteur allemand qui joue l’idiot « Totor », c’est par nostalgie de ces années-là et parce que je crois que le rire libère de l’oppression, de toutes les oppressions. Et puis, « la gravité est le bouclier des sots » disait un philosophe des Lumières. La vie n’est-elle pas une comédie ? parfois une tragi-comédie !

Plus sérieusement, je suis un peu en colère d’entendre galvauder ce mot de « terroriste » pour désigner un assassin dont nous ne savons rien d’autre que ce que seuls les médias veulent bien nous en dire. Alors, que pouvons-nous comprendre par nous-mêmes ? Peut-être que dans notre société du Jugement, celle dont Kafka pressentait l’avènement, il est devenu inutile d’aspirer à la compréhension, il s’agit seulement d’espérer la clémence.

Professeur Mottro , 29 mai 2018.