Allemagne, Italie, France*, les fachos progressent par les urnes.

En Allemagne, le succès d’Alternative für Deutschland (AfD) aux élections de Thuringe (octobre 2019) a de quoi susciter nos inquiétudes. La Große Koalition conclut entre les conservateurs d’Angela Merkel et les sociaux-démocrates, avant l’élection de la chancelière par le Bundestag (mars 2019), avait pour but de marginaliser Alternativ für Deutschland, 94 députés au compteur sur 709, plus 11 eurodéputés. Et d’éviter que la réact’ CSU ne parvienne à tirer la CDU vers son extrême. Preuve que cette stratégie d’ostracisme n’a pas fonctionné, le dernier score de l’AfD en Thuringe : 23,4 %. Ce parti double son score du scrutin national de septembre 2017 (12,9%) et fait mieux que la CDU-CSU d’Angela Merkel. La “bonne nouvelle” c’est que les gauchistes de Die Linke font 31 %. Devant les conservateurs. Signe d’une polarisation des extrêmes ? Peut-être.

En Italie, à présent. N’enterrons pas Matteo Salvini trop vite. Celui-ci n’était que ministre de l’Intérieur dans un gouvernement de coalition. Grâce à quoi il apparaissait chaque soir à la télé. C’est ainsi que la Ligue du Nord, le parti des mécontents, est devenue le premier parti en Italie. La Ligue résume l’esprit de l’électorat, un esprit de malaise social et démocratique, identique à celui des Gilet jaunes, en France. Avant la Ligue, la colère des Italiens s’était exprimé jusqu’en 2018 pour le Mouvement 5 étoiles, supposé à gauche : Pepe Grillo et Jean-Luc Mélenchon avaient le même coiffeur. Mais en croyant rafler la mise, Matteo Salvini a fait tomber, à l’été 2019, le gouvernement de coalition auquel il appartenait. Et il a perdu, car ses ennemis se sont rassemblés pour lui faire obstacle. Il a commis ce jour-là une grosse erreur. Qu’il est en train de rattraper fissa. Car les récentes élections en Ombrie (octobre 2019) le prouve : Cinq étoiles était en tête aux législatives de 2018 avec 33 % des votes, il n’a récolté que 7,5 % des voix de l’Italie centrale. Tandis que la Ligue caracole à 37 %. Les prochaine élections régionales pourraient bien être de la même eau. Pourrie.

Le Rassemblement National en France tente depuis plusieurs années de remporter l’élection présidentielle, la clé de toutes les autres dans le cadre institutionnel ringard qui est le nôtre. En 2017, Marine Le Pen avait réuni 10,6 millions de voix. Soit deux fois plus que le score de son père en 2002 (5,5 millions). De plus en 2017, l’abstention avait atteint 25,3%, alors qu’elle n’était que de 19% en 2002. La candidate d’extrême droite a donc de bonnes chances, sous ce double mouvement, de parvenir un jour au pouvoir par les urnes.

Dans ces trois pays-piliers de l’Union Européenne (deux régimes parlementaires, un présidentiel) l’érosion de la démocratie représentative se poursuit.  Les partis classiques, aussi bien de droite que de gauche, s’affrontent avec les partis d’extrême-droite. Mais les affronter, ce n’est pas leur couper l’herbe sous le pied. Bien au contraire : parce qu’ils ne leur font barrage que dans le seul but de poursuivre leurs politiques libérales fiscalement injustes : disparition de l’impôt sur la fortune, augmentation de l’impôt sur le gasoil ou de la tva. Et socialement néfastes : démantèlement de la retraite par répartition, révision à la baisse de l’indemnité chômage, blocage des salaires, casse des hôpitaux publics (dont les blouses blanches alimenteront les prochains Gilets Jaunes)…

* Et maintenant l’Espagne, avec le parti Vox pro-franquiste et anti-catalan, qui progresse de presque 5% dans l’électorat (élections du 10 nov. 2019). Ce qui provoque l’inimaginable : une alliance de gouvernement entre PS et Podemos (extrême gauche).