précari-té/-sation

Avant que Dieu ne le ruine arbitrairement, qu'il ne tue son bétail, sa femme et ses enfants, Job était riche et insouciant. Ce n'est que sur son tas de fumier que Job se sentit soudain précaire, tout en continuant de prier ce seigneur-dieu aux voies impénétrables et incompréhensibles. La précarité n'est pas la pauvreté. Les riches devraient se sentir bien plus précaires que les pauvres. Et les très riches, très précaires.

Dans le monde moderne, où tout un chacun se pense propriétaire de son travail ou d'une partie de son entreprise, perdre son emploi, c'est vivre ce qu'a vécu Job. Se séparer ou divorcer, voir le bonheur que l'on croyait tenir, s'effondrer brusquement, idem. L'insécurité sur ses biens matériels, sur sa famille, crée de la précarité et celle-ci est le propre de la condition humaine.

Aussi lorsqu'un crétin libéral, imaginant que Job a finalement rebondi, en déduit que le "struggle for life" est bon pour l'individu et qu'il est bon pour la société, il y a comme de l'entourloupe dans l'air. Car la précarité ne se justifie en AUCUNE façon et personne ne devrait la vouloir pour les autres. Il faut la réduire par la solidarité sous peine de voir surgir une société où "homo homini lupus".

Or, aujourd'hui, c'est bien en agitant la menace du chômage ou du licenciement, ou en faisant du chantage affectif, que l'on obtient la soumission des uns et le consentement des autres.