Pour faire de la soupe de grenouilles, il existe en réalité deux méthodes, la bonne et la mauvaise.
La mauvaise consiste à jeter la grenouille dans l’eau bouillante. C’est ce que les nazis ont essayé de faire en France entre 1940 et 1944. Ce que les Français ont tenté de faire en Indochine ou en Algérie. Ce que les Américains ont répété au Chili, en Irak, en Afghanistan, etc. La grenouille se débat tellement qu’elle finit toujours par sauter hors de la casserole. Cette méthode fait donc un bide à chaque fois.
La bonne méthode est celle-ci: il faut placer la grenouille dans l’eau froide. Puis mettre la casserole sur le feu pour monter tout doucement en température. Tout doucement. C’est à dire abolir les droits humains les uns après les autres, les rendre inapplicables progressivement, tout en prétextant la sécurité des honnêtes citoyens contre d’obscurs djihadistes, fantasmés ou réels peu importe: « Vous-même n’avez rien à vous reprocher, n’est-ce pas ? »
Attention, cependant ! Les bons citoyens d’aujourd’hui, sous un gouvernement socialiste, ne sont pas nécessairement les bons citoyens de demain, sous un gouvernement national-socialiste. Et lorsque dans deux ou trois ans vous critiquerez le père fondateur qui persiste et signe que « les chambres à gaz sont un détail de l’Histoire » (récidive du 22 mars 2015) c’est vous qui risquerez un petit coup de zyklon B pour vous déboucher les narines.
Cela fait longtemps que le Conotron a proclamé que la vie privée était abolie. Depuis 2001 et les lois liberticides votées aux Etats Unis, notamment le tristement fameux / fumeux Patriot Act. Et tout ce qui s’ensuivit : prisons secrètes, torture, etc. Révélé plus tard par l’ami Edward S. Mais comme il s’agissait de la vie privée de quelques lointains fucking météques, plutôt que de celles de citoyens blancs bien propres sur eux, l’opinion française s’est dit qu’après tous ces moyens là justifiaient la fin, i.e leur tranquilité, peinards au bord de la piscine, à se goinfrer un barbeuq.
Dans une indifférence gentillette, certains Etats comme la France semblaient en effet plus ou moins résister à la psychose paranoïaque mondiale. C’est désormais bien fini: ce beau pays vient lui aussi de craquer. En France, l’Etat peut désormais espionner tout citoyen français sans avoir à le justifier auprès d’une quelconque autorité judiciaire.
Il semble de plus que techniquement la technologie mise en oeuvre par les boîtes noires, que les fournisseurs d’accès internet devront coller aux fesses de leurs serveurs, corresponde à une « inspection profonde du paquet » en anglais DPI ou deep packet inspection. Ce qui signifie qu’il n’existe plus rien de secret, métadonnées et contenu, pour les services secrets exploitants les dites boîtes noires.
Une pétition qui circule et que l’on peut signer ici; une analyse fastidieuse mais éclairante sur cette régression des droits humains en France là ; ou encore un avis technique fouillé et bien documenté.
Croyez-en les Français, amis du monde entier ! Question grenouilles et cuisine de la grenouille, ici, on en connaît un rayon… Ce n’est pas pour rien que nos amis anglo-saxons nous appellent les Froggies.
Note aux benêts [juillet 2015] : l’avis – positif ! mais si, c’est possible… – du Conseil Constitutionnel est une preuve supplémentaire de la connerie du droit politique tel qu’on l’exerce en France sous la Vème république.
Note aux benêts-bis [mars 2016] : Voici un bel exemple de bug, épinglé par la CNIL, dans l’application de la loi sur la surveillance généralisée. Est-il bien normal / légal que l’Etat délègue une tâche de police à une société privée, Numéricable ?